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« École, violence et domination – La préface »

Hubert MONTAGNER

Hubert Montagner est un scientifique mondialement connu, entre autres par ses travaux de chronobiologiste. Il a écrit de nombreux ouvrages sur le développement de l’enfant, contribué à la conception de crèches, d’écoles (la dernière en date est l’école de Monticello en Corse), et a été sollicité dans de nombreux colloques scientifiques internationaux.

Depuis des années, c’est un inlassable combattant pour la transformation de l’école et un ardent défenseur de ceux qui y participent de manière active. Il prend régulièrement la défense d’enseignants signataires de la Charte de désobéissance malmenés par leur hiérarchie, et ne manque pas une occasion de s’adresser directement aux divers ministres pour leur indiquer quel pourrait être le sens du changement, eu égard, toujours, aux intérêts de l’enfant.

C’est pour ces raisons et la sincérité de ses engagements qu’il a été sollicité par Pierre Badiou et Dominique Vachelard pour l’écriture d’une préface de leur ouvrage publié en 2011 [1], le conduisant à livrer une réflexion qui se situe certes un peu aux marges de sa spécialité, mais sans lui être totalement étrangère, ainsi que chacun pourra en juger...

Je n’ai pas de compétence particulière pour analyser le livre très sérieux que Pierre Badiou et Dominique Vachelard nous proposent sur « Ecole, violence et domination ». En effet, je ne suis pas pédagogue ni expert en Sciences de l’Education. Je ne suis pas davantage sociologue ni spécialiste des relations qui existent entre les pouvoirs dominants ou ordres établis et le fonctionnement de l’Education Nationale et son école. Pourtant, j’ai éprouvé beaucoup d’intérêt et de plaisir à lire cet ouvrage, d’abord parce qu’il est bien écrit et pensé, et parce qu’il va au fond des problèmes qui empêchent les enfants des classes sociales non dominantes de se réaliser à la fois comme élève intelligent et comme « penseur social ». La raison essentielle est que l’école ne leur permet pas de devenir des vrais lecteurs et des vrais « écriteurs », c’est-à-dire de comprendre vraiment le sens de ce qu’ils lisent et écrivent. Mais, si le livre de Pierre Badiou et Dominique Vachelard m’intéresse au plus haut point, c’est aussi parce qu’il rejoint mes préoccupations de chercheur engagé depuis plus de trente ans dans l’étude du développement, des comportements, des systèmes de communication et des rythmes du « petit de l’Homme ». Je trouve en effet dans cet ouvrage des analyses qui me permettent de compléter mes constats et conclusions, et de mieux appréhender les difficultés qui empêchent un enfant démuni de se réaliser comme élève et comme personne sociale dans une école formatée et rigide, imposée par des pouvoirs dont les principes sont la domination, l’individualisme et la compétition. « Ecole, violence et domination » sera très utile pour ouvrir les yeux de ceux qui n’ont pas compris ou ne veulent pas comprendre que, dans son fonctionnement actuel, l’école reproduit « de père en fils » les dominations et les ordres établis, toutes « filiations » politiques confondues. Ce livre sera salutaire pour les enseignants malgré leur dévouement et leur volonté de « bien faire » au bénéfice de tous les enfants-élèves de leur(s) classe(s). En effet, fondamentalement généreux, intelligent et altruiste, le livre de Pierre Badiou et Dominique Vachelard nous propose une vraie réflexion sur les insuffisances de l’Institution scolaire de la France. Mais, il ne se contente pas de dénoncer.

Constructif, il nous donne des pistes sérieuses et des approches concrètes sur ce que l’institution scolaire pourrait être, avec pour perspective « l’école de l’utopie »... mais réalisable. Dans cette préface, j’ai accordé une place prépondérante à des extraits du livre qui me paraissent majeurs, à la fois pour ne pas trahir la pensée des auteurs et pour éviter des interprétations ou digressions inutiles qui pourraient brouiller ce qu’ils écrivent clairement.

Dans une première partie, Pierre Badiou et Dominique Vachelard expliquent pourquoi et comment « les règles de fonctionnement de l’Education Nationale sont la chasse gardée du pouvoir politique ». Ce qui permet à celui-ci de concevoir l’école pour qu’elle « joue un rôle essentiel dans le conditionnement social des individus ». En conséquence, lorsque le pouvoir politique annonce qu’il va réformer l’institution scolaire, il n’a pas pour objectif de la changer, mais de faire en sorte qu’elle « continue d’être ce qu’elle est : une fabrique de l’obéissance à l’ordre social ». « Réformer... c’est pour que rien ne change... telle pourrait être la devise du pouvoir en ce qui concerne l’école ». Ce postulat est vérifié en permanence. Le dernier exemple est celui de l’empilement des réformes désastreuses qui ont été imposées par le Ministre de l’Education Nationale, Monsieur Xavier Darcos. Son successeur ne sait quoi faire et patauge pour essayer de les détricoter.

En se fondant sur l’histoire, Pierre Badiou et Dominique Vachelard expliquent de façon convaincante que l’institution scolaire « ne s’est pas contentée d’instruire », mais qu’elle a aussi contribué à « éduquer », « à inculquer les valeurs qui assurent à la classe dominante le maintien de sa domination... l’individualisme et la compétition, la concurrence, le classement et la hiérarchie, l’obéissance respectueuse due au supérieur ». Pierre Badiou et Dominique Vachelard complètent cette évidence... qu’il fallait rappeler et expliciter clairement, en soulignant que « Rien ne le laisse mieux voir que l’enseignement de la langue, instrument de domination par excellence. En maîtriser les codes et les multiples registres est la condition même de l’exercice du pouvoir ». La porte est ouverte pour que les auteurs nous expliquent avec conviction pourquoi et comment l’école doit modifier son mode de fonctionnement pour que tous les enfants puissent devenir de vrais lecteurs et de vrais « écriteurs ».

Au préalable, ils posent en postulat que l’école doit avoir pour vocation « d’être un lieu d’étude, de réflexion, de théorisation, même, de ce qui se vit dans la société tout entière, de ce qui la travaille — y compris bien entendu dans l’école elle-même — et, par là, un lieu d’approfondissement des connaissances et de la capacité à en produire de nouvelles. En d’autres termes, l’école devrait être un lieu d’apprentissage du pouvoir, individuel et collectif, à travers les savoirs qu’elle permettrait d’acquérir ». On ne peut que souscrire à cette exigence de transformation de l’école.

Un obstacle essentiel est, selon le mot de Paolo Freire que rappellent les auteurs, la « Logique bancaire de l’Education : « le savoir est détenu par quelques-uns, « plus savants », qui le déversent, selon des procédures codifiées, dans la tête des enseignés », (« la tâche d’enseigner est dévolue à un adulte — un « enseignant » — et à lui seul ; elle ne saurait être partagée puisque lui seul « sait » et qu’il a pour mission de transmettre son savoir à des élèves censés être des ignorants »). En fait, « les connaissances chichement dispensées sont appelées à produire du profit ; elles sont destinées au marché, et se doivent nécessairement d’être opérationnelles ». La relation intime qui existe entre savoir et pouvoir ne fait pas de doute ; elle est ancienne. Toute personne détentrice d’une expertise dans un domaine particulier est en position d’exercer sur « les ignorants » l’autorité de « celui qui sait ». « Dans cette perspective, la capacité à s’assurer le monopole de la maîtrise de l’écriture et de la lecture « savantes » constitue une source incontestable de domination. En conséquence, « les pratiques scolaires se donnent comme seul objectif de faire acquérir du mieux possible la maîtrise langagière officialisée, celle de la minorité dominante. Toute autre forme de langage est bannie... On peut donc dire sans exagération que les classes dominées, hors de leur milieu — et bien sûr leurs enfants à l’école — ne parlent pas ou parlent « mal » parce qu’on leur a refusé la possibilité de dire leurs expériences, de forger leurs concepts, d’élaborer leur culture ». « La parole est donc un puissant outil de domination symbolique. Une parole que la société à travers l’école s’efforce « de normaliser afin de s’en rendre maître ». Elle devient LA parole prescrite que la communauté reconnaît comme sienne et transmet sans broncher à ses descendants, « avec l’image du monde qu’elle véhicule ». « Langue et politique sont intimement liées ». En conséquence, « le débat actuel — voire l’affrontement — entre les tenants d’une « école traditionnelle » (celle conçue par Jules Ferry, dans ses grandes lignes) et ceux qui militent pour une autre école adoptant des méthodes dites nouvelles, et qu’on accuse de sombrer dans le pédagogisme, dépasse le simple domaine pédagogique ».

Passant aux conditions concrètes d’un vrai changement de l’école, et au sein de la classe, Pierre Badiou et Dominique Vachelard préconisent de remplacer les pratiques pédagogiques en vigueur pour que « les enfants ne soient pas passifs, soumis et résignés, mais cherchent à comprendre le sens des choses ». Ils s’inspirent notamment des principes de l’Ecole Mutuelle venue d’Angleterre au 20e siècle : la souplesse, l’entraide, l’émulation et le statut de responsabilité (qui enseigne quoi dans le « groupe classe »). Evidemment influencés par Célestin Freinet et bien d’autres, ils proposent « une pédagogie qui libère la parole et s’appuie sur une mutualisation des apprentissages », fondée « sur les échanges entre le « maître » et les apprenants, et entre ces derniers, pour progresser dans la connaissance réelle, concrète et non artificielle du monde, alors que cela est interdit par les structures mêmes qui régissent la vie de la classe traditionnelle », et « concourt à favoriser la concurrence, le classement, la hiérarchie ». Ils soulignent que, « de lui-même, l’enfant affronte le réel dans toute sa complexité et s’efforce de le maîtriser par des tentatives répétées, des erreurs et des échecs bien sûr, puis petit à petit, des succès de plus en plus tangibles ». « On apprend en faisant... le véritable moteur de la motivation des élèves réside dans l’estime de soi que donnent l’apprentissage maîtrisé et l’exercice réussi ».

Pierre Badiou et Dominique Vachelard rejoignent les constats de la recherche sur le développement et les conduites de l’enfant. En effet, dès la deuxième moitié de la première année postnatale, lorsque les conditions s’y prêtent, les enfants partent déjà à l’exploration des possibilités offertes par l’environnement et apprennent « à leur rythme » (quand ils sont prêts) les stratégies qui permettent de le modifier et de le maîtriser, même quand il est complexe. A tous les âges, les enfants découvrent et apprennent en explorant leurs possibilités, potentialités, compétences cachées ou lisibles, hypothèses... Et celles des autres. Plus largement, l’école doit, enfin, être refondée pour être un lieu de libération et de développement des fonctions cérébrales et des ressorts psychiques les plus complexes... en alliance avec le corps et la conquête de l’espace qu’il autorise. Elle doit permettre la comparaison et l’examen critique des informations issues des échanges langagiers, des écrits, des images... plus généralement de l’environnement et des partenaires afin d’en comprendre le sens et la signification, mais aussi l’anticipation, l’élaboration de stratégies, la construction de la pensée... Sans oublier le développement des interactions sociales et des processus de socialisation, ainsi que la libération imbriquée du langage oral, des émotions et des liens affectifs. Au fond, l’école doit être un lieu d’épanouissement de l’individu et de son intelligence buissonnante, en étant ancrée dans les réalités sociales comme le souhaitent Pierre Badiou et Dominique Vachelard.

S’agissant de la lecture et de l’écriture, le vrai sujet de l’ouvrage, Pierre Badiou et Dominique Vachelard s’inquiètent de voir se perpétuer à l’école les formes actuelles d’apprentissage. Ils proposent avec force que la lecture devienne ce qu’ils nomment une « lecture savante » dont l’objectif soit la formation de véritables lecteurs et non de « déchiffreurs » de lettres, syllabes, mots, phrases... et « des utilisateurs de l’écrit pour ce qu’il a de différent de l’oral ». Il faut pour cela que les enfants acquièrent le double statut de lecteur et « d’écriteur ». «  Il est plus que jamais indispensable que les enfants et les adolescents écrivent, par eux-mêmes, qu’ils tentent sans cesse de travailler leur langage. Ce qui leur permettra de mieux exprimer leurs points de vue, et de les échanger, car lire et écrire, c’est communiquer. Et acquérir des savoirs complexes ». Les enfants peuvent alors devenir « des citoyens critiques, capables de s’impliquer dans la vie politique et sociale... C’est ainsi que la majorité de la population parviendra à se saisir de l’écrit, cet outil de pouvoir. Forte de cette arme qui lui permettra de bien mieux comprendre les rouages de la machine sociale, elle pourra contester vigoureusement la domination dont elle est victime et concevoir un autre monde. Pour cela, il faut sortir des formalismes sclérosants qui caractérisent l’institution scolaire, tant dans son fonctionnement général (hiérarchie, discipline, notation, carrière, formations internes, etc.) que dans les outils, les pratiques mises en œuvre au quotidien dans les classes ». Pierre Badiou et Dominique Vachelard soulignent que la pensée officielle qui persiste à confondre lecture et déchiffrage est une véritable mystification. En fait, il semble établi que seulement 20% des enfants en 6e « possèdent des compétences caractéristiques d’un réel savoir lire, c’est-à-dire de saisir l’implicite d’un texte (« ce qui n’est pas formellement écrit mais qu’on peut lire entre les lignes »). « A la différence du déchiffreur, le lecteur ne cherche nullement à produire des sons ». Pour lui, « une langue écrite est une langue pour les yeux, et, un texte, un ensemble structuré de signes écrits, dont il cherche à pénétrer le sens. Pour cela il use de stratégies totalement ignorées du déchiffreur ». Pierre Badiou et Dominique Vachelard développent deux exemples mis en place à Brioude, ville-lecture, pour illustrer les profondes transformations qui peuvent être obtenues par de nouvelles pratiques pédagogiques : dans des classes de 6e où les élèves s’exercent avec ELSA (logiciel d’entraînement à la lecture savante), mis au point par l’Association Française pour la Lecture (AFL) et par l’Institut National de la Recherche Pédagogique (INRP) ; et auprès de personnes victimes d’exclusions répétées. Dans les deux cas, « il faut à l’évidence, des situations de communication qui leur permettent de parler d’eux mêmes, de ce qu’ils vivent, exprimer leurs expériences, dans leur langage, afin d’affiner progressivement cet outil et d’en faire un instrument de leur culture. Ce qui ne semble pas être le souci de la pédagogie traditionnelle ».

S’agissant des classes de 6e, Pierre Badiou et Dominique Vachelard montrent comment « les statuts respectifs des acteurs du processus éducatif sont modifiés par des exemples issus de pratiques quotidiennes de classe. En termes de statuts, l’enseignant a affaire à des lecteurs — potentiels, certes, mais lecteurs ! — dotés d’une histoire, d’expériences, de savoirs provisoires, et non d’ignares à qui il faut impérativement transmettre les savoirs et les savoir-faire que leur future insertion sociale exige ». Partant de ces principes, « le journal quotidien de la classe est offert tous les matins à chacun ». Sa lecture est « un acte authentique » et « un enjeu capital » parce que « c’est la vie même du groupe qu’il contient ». C’est un « acte authentique » : « Le lecteur se doit naturellement d’interroger le texte — ainsi que son auteur et les autres membres du groupe — bien au-delà du simple ordonnancement des mots qui le composent et de la narration de faits ou d’événements que chacun connaît déjà pour les avoir vécus collectivement. La mise à distance par l’écriture de l’expérience immédiate est pour chacun une occasion d’abstraction, de théorisation de la réalité vécue. Mais encore faut-il provoquer ou favoriser cette conscientisation ! C’est ce qui se fait au moment de l’écriture et de la réécriture (avec intervention de l’adulte), mais aussi au cours du débat du groupe où les enfants sont conduits à des temps de réflexion sur les divers écrits et les points de vue qu’ils renferment ». « L’enseignant se trouve lui aussi en situation d’apprentissage... il doit lui aussi écrire sur son expérience dans le journal... Il inscrit ainsi son action dans le même axe qu’eux. Il participe à la construction commune sans s’ériger en juge ou censeur des productions puisque c’est le groupe qui choisit de relever tel ou tel écrit pour en débattre, puis qui formule des critiques sur ces textes, ceux des enfants comme ceux des adultes ».

C’est dans ce cadre que Pierre Badiou et Dominique Vachelard expliquent le concept de lecture savante (ou experte) créé par l’AFL. « Il permet de distinguer l’activité de lecture telle qu’elle est communément admise (la capacité à oraliser, à dire un texte à haute voix), d’une vision fonctionnelle de ce comportement tout orienté vers la compréhension, à tel point d’ailleurs qu’on ne saurait dissocier ces deux temps (lecture et compréhension) ». Pierre Badiou et Dominique Vachelard « envisagent quelles compétences favorisent la maîtrise experte de la lecture dans le domaine de l’école, mais aussi dans la vie sociale de l’individu. On permet ainsi des conditions à la fois pour l’émancipation scolaire et l’émancipation sociale ».

C’est donc avec le logiciel ELSA précédemment évoqué que Pierre Badiou et Dominique Vachelard se proposent de « comprendre les mécanismes de la lecture et de proposer des supports permettant d’entraîner les stratégies et habiletés mises en œuvre dans la compréhension de la langue écrite ». « Des tests sont régulièrement proposés afin que celui qui s’entraîne prenne conscience de l’évolution de son comportement et de sa performance globale. L’entraînement se déroule sur au moins une quarantaine d’heures, ce qui à raison de 30 minutes par séance et 2 séances par semaine couvre environ une année scolaire ».

Les résultats sont étonnants. Dans l’expérimentation réalisée à Brioude, ville-lecture, alors que deux paramètres sont pris en compte (la vitesse et la compréhension), les expérimentateurs constatent une évolution très significative de « la vitesse », une évolution positive du « taux de compréhension » et une évolution très satisfaisante de « l’efficacité ». « Au début de l’entraînement, seuls deux élèves peuvent être considérés comme lecteurs — au regard de la seule performance en vitesse —, alors qu’au terme de l’année scolaire ce sont 65 d’entre eux qui le sont devenus (88%) »... « en se libérant des entraves de l’oralisation ». En outre, « 73 élèves ont vu leur efficacité de lecture progresser : 52 des élèves l’ont plus que doublée ». On se
référera au texte pour plus d’informations.

On ne rapportera pas ici les résultats de « l’expérimentation » fondée sur les mêmes principes, et conduite selon la même démarche, avec des personnes victimes d’exclusions répétées car elle est encore parcellaire en raison des difficultés à organiser un suivi que les contraintes sociales et autres ont rendu difficile. Mais ils sont prometteurs. Il est souhaitable que cette « opération » soit poursuivie à Brioude et dans de nouvelles villes-lectures, au sein des réseaux préconisés par Pierre Badiou et Dominique Vachelard. Il peut être un levier important pour sortir de leur marginalité et de leurs difficultés des personnes que l’on a mises à l’écart de la société, ou qui se sont exclues d’elles-mêmes.

Par leur travail et leur ouvrage, Pierre Badiou et Dominique Vachelard apportent une contribution originale et majeure à la compréhension des mécanismes de la lecture... et aux stratégies à mettre en œuvre dans la compréhension de la langue écrite. Ils proposent un outil précieux pour que les enfants en difficulté puissent devenir de vrais lecteurs et de vrais « éditeurs » alors que l’école manipulée par le pouvoir politique les laisse au bord de la route du savoir, et ainsi en dehors d’une vraie culture qu’ils puissent construire par eux-mêmes. Il faut les remercier de nous proposer une réflexion forte « qui s’efforce de rendre perceptibles les liens forts qui rattachent entre elles diverses réalités de notre monde : l’école et ses pratiques, l’appropriation de l’écrit savant et la confiscation de la parole par une minorité, la domination symbolique et la violence qu’elle génère, le pouvoir attribué aux Savoirs officiels, l’importance du statut social... ».

Ce faisant, ils nous conduisent « à porter un regard politique sur l’ensemble de ces relations ».

Hubert MONTAGNER, Docteur-ès-sciences, Professeurdes Universités en retraite, ancien Directeur de Recherche à l’INSERM, ancien Directeur de l’Unité de Recherche « Enfance Inadaptée » de l’INSERM.
« École, violence et domination – La préface »

[1École, violence et domination, Pierre BADIOU et Dominique VACHELARD, Éditions du Cygne, 2011.